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Pur et Impur (deuxième partie)

Pur et Impur (deuxième partie)

Dans la première partie de cet article, j'avais abordé des thèmes comme la notion de pureté dans l'Ancien et le Nouveau Testament, la séparation du sacré et du profane et la façon dont les auteurs bibliques abordaient ces sujets dans leurs écrits. Dans cette deuxième partie, je vais évoquer des sujets plus "délicats" comme les menstruations, la nudité, les pertes séminales, le viol, le rapport au sang ou encore les maladies vénériennes. Bien évidemment, ces sujets seront abordés à la lumière de ce qu'en disent les Écritures. Il n'est nullement question de porter un quelconque jugement ou une appréciation "morale". Pas plus que de vouloir défendre une position "légaliste". La démarche qui est entreprise ici répond à une question simple : "Que dit l'Écriture ?". J'ai toujours le désir, lorsque je traite un sujet biblique, de le faire le plus honnêtement et de la façon la plus exhaustive possible. En abordant de cette manière le thème du pur et de l'impur, je savais qu'il me faudrait parler de sujets sensibles. La Parole de Dieu traite de tous les sujets qui concernent l'être humain, non pour le condamner sans appel mais pour lui apporter les réponses dont il a impérativement besoin. Mais dans la masse d'informations que nous fournit l'Ecriture, il n'est pas toujours aisé d'y trouver les réponses à des questions qu'il est parfois même difficile de formuler. 

Outre la sensibilité du sujet, la quantité de passages, de versets abordant ces thèmes est volumineuse. Ceux-ci ne flattent bien évidemment pas la chair. Leur abord est parfois un peu abrupt et sec. Dans le cas présent, les textes principaux ou annexes sont nombreux, souvent denses de par leur contenu. Brutaux parfois. Bien que j'aie essayé de donner autant que possible de fluidité au texte, il me fallait lui laisser sa force vive au risque de le dénaturer. Le lecteur qui choisit de s'enfoncer au cœur de ces textes ne peut qu'en être impacté, à divers degrés que se soit. À cette heure où je tente de remettre en forme cette masse d'informations, j'en prends, plus encore, conscience. J'avoue que ce n'est pas une démarche facile, mais je désire la poursuivre le plus honnêtement possible et surtout de la façon la plus neutre tout en demeurant dans la pensée des auteurs bibliques. Mais surtout, si cela peut apporter une petite pierre à la compréhension des Écritures, un semblant de réponse à un questionnement sur l'un de ces sujets, quel qu'il soit, alors le but de la rédaction de cet article aura été atteint. 

Purifié et mis à part

Je poursuis ici sur le dernier sujet abordé dans la première partie de cet article. Cette subtile notion qui différencie "la purification par la mise à part" (tahowr) de la "purification" proprement dite (taher). Le "tahowr" est une "mise à part pour un but" alors que la notion de "taher" est une "purification de ce qui a été souillé, de la purification de ce qui l'a souillé". Ce sont là des notions subtiles que développent les auteurs bibliques. Des notions que les écrits du Nouveau Testament abordent plutôt sous l'appellation de "sanctification", terme qui nous est plus familier. Mais dans l'esprit des rédacteurs apostoliques, ces notions hébraïques étaient cependant bien claires et bien présentes. J'avais, par exemple, évoqué le lépreux guéri par les mains de Jésus qui avait été mis à l'écart à cause de sa maladie et qui, une fois guéri était "mis à part" parce que devenu disciple de Yeshoua, le Seigneur Jésus-Christ (Matthieu 8:3). "La lèpre le quitta et il fut purifié", dit Marc (Marc 1:42). Le péché nous éloigne de Dieu et nous empêche de nous en approcher. Mais lorsque un pécheur se repent et que, par la repentance et la conversion il devient disciple du Seigneur Jésus, il est alors "mis à part" de par sa sanctification. Il est "purifié" et "sanctifié". "Ayant purifié leur cœur par la foi" (Actes 15:9) en ayant "purifié vos âmes en obéissant à la vérité" (1 Pierre 1:22). Cette purification n'est pas le produit de nos efforts personnels mais elle s'est faite par l'effusion du Sang du Seigneur sans laquelle il ne pourrait y avoir de pardon divin. "Et presque tout, d'après la loi, est purifié avec du sang, et sans effusion de sang il n'y a pas de pardon" (Hébreux 9:22). Il nous faut, tout comme il l'est demandé à Jérusalem, "purifier nos cœur du mal afin d'être sauvés", en nous détachant "de toute iniquité". "Purifie ton cœur du mal, Jérusalem, afin que tu sois sauvée ! Jusqu'à quand garderas-tu dans ton cœur tes pensées iniques ? (Jérémie 4:14). 

Pour introduire le sujet proprement dit, je poursuivrai sur le thème qui a été abordé dans la première partie de cet article dans lequel il était fait mention de la pureté de l'être et de ce que cette notion peut évoquer. Et comme toute bonne réflexion commence par une question, je débuterai donc par l'une d'elles. L'auteur du livre des Proverbes s'interroge : "Qui peut prétendre être "net" (taher) de tout péché ? En effet, l'homme ne peut être "pur" (taher) devant Dieu" (Job 4:17). C'est cependant ce que désire le Psalmiste lorsqu'il dit : "Purifie-moi avec l'hysope et je serai pur (taher)" (Psaume 51:9). Les protocoles lévitiques, comme l'aspersion de sang avec la branche d'hysope, offraient cette opportunité, bien évidemment en prévision du sacrifice parfait de Christ dont ils étaient une préfiguration. Cette forme de purification pouvait tout aussi bien s'appliquer au peuple en diaspora qu'à la ville de Jérusalem, ou encore au pays lui-même (Ezéchiel 22:24 / 24:13 / 36:25, 33), de ses autels idolâtres (2 Chroniques 34:3) et de leurs prêtres (2 Chroniques 34:5), et ce, sur toute la surface du pays (2 Chroniques 34:8). Cette "purification" pouvait également concerner les murailles de Jérusalem (Néhémie 12:30) ainsi que les chambres du Temple (Néhémie 13:9) afin qu'y soient stockés les ustensiles sacrés. Ce mode de purification perdurera jusque dans les Temps messianiques (Ezéchiel 43:26). Mais avant ces temps bénis doit avoir lieu la fameuse guerre de Gog. A la fin de celle-ci, une période de taher sera nécessaire pour ensevelir les dépouilles qui joncheront le pays. Elle durera plusieurs mois (Ezéchiel 39:12, 14). Dieu annonce, par la bouche du prophète Malachie, qu'Il "purifiera (taher) les fils de Lévi. Il les "épurera comme on épure l'or et l'argent" afin que ceux-ci puissent lui offrir "des offrandes avec justice" (Malachie 3:3). 

Un mot, dérivé de Taher, désigne une autre forme de "pureté" "tohar". Il n'apparaît que quatre fois dans les Ecritures. La première mention qui en est faite est dans le livre de l'Exode, lorsque Moïse, Aaron et les soixante-dix anciens montèrent à la montagne de Dieu. "Ils virent le Dieu d'Israël, sous ses pieds c'était comme un ouvrage transparent, comme le ciel lui-même dans sa pureté" (tohar - Exode 24:10). On touche ici à une pureté immaculée. Une pureté que l'on ne croirait trouver que dans la sainte Présence de Dieu, et pourtant… Les deuxième et troisième mentions de ce mot se trouvent dans le douzième chapitre du livre du Lévitique qui commence par ces mots : "l'Eternel parla à Moïse et dit" (Lévitique 12:1). Le texte de l'Exode relate la vision de la Présence de Dieu, le texte du Lévitique, lui, reproduit ses paroles (lorsque Moïse était seul sur la montagne)"L'Eternel parla et dit : Parle aux enfants d'Israël et dis : lorsqu'une femme deviendra  enceinte et qu'elle enfantera un mâle, elle sera impure pendant sept jours, elle sera impure comme au temps de son indisposition menstruelle. Le huitième jour, l'enfant sera circoncis. Elle restera encore trente-trois jours à se purifier (tohora) de son sang. Elle ne touchera aucune chose sainte et elle n'ira pas au sanctuaire jusqu'à ce que les jours de sa purification (tohar) soient accomplis" (Lévitique 12:1 à 4). Une première occurrence présente donc cette forme de pureté comme étant de nature céleste, reflétant la présence même de Dieu. La deuxième désigne un temps de mise à l'écart de la femme qui vient d'enfanter. Comment deux choses tellement éloignées l'une de l'autre peuvent-elles se correspondre ? Quel étrange lien peut-il bien les réunir sous un même vocable ? La troisième occurrence se trouve dans ce même chapitre 12. "Lorsque les jours de sa purification (tohar) seront accomplis" (Lévitique 12:6). Pour se rapprocher de la réponse, il nous faut faire un bond dans le temps. Un gigantesque bon de plusieurs siècles jusqu'à cette époque où un jeune couple, obéissant aux prescriptions requises, se rendait au Temple de Jérusalem. "Le huitième jour, auquel l'enfant devait être circoncis, étant arrivé, on lui donna le nom de Yeshoua… et quand les jours de leur purification furent accomplis, selon la loi de Moïse, Joseph et Marie le portèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur, suivant ce qui est écrit dans la loi du Seigneur… et pour offrir en sacrifice deux tourterelles ou deux jeunes pigeons, comme cela est prescrit dans la loi du Seigneur" (Luc 2:21 à 24). Nul doute que Luc fait effectivement bien mention du douzième chapitre du livre du Lévitique. Jésus, enfant, allait être présenté "au Seigneur" après que Marie, sa mère, ait achevé son temps de "purification". Il apparaît évident que le mot "purification" dont il est fait mention ici correspond à l'hébreu "tohar". Sauf que l'Evangile est rédigé, lui, en grec. Ce n'est donc pas le mot hébreu "tohar" qui apparaît dans le texte de Luc (même si c'est bien de cela dont il est question), mais le mot grec "katharismos". Celui-ci vient de cet autre mot dont j'ai parlé plus haut : "katharizo". Katharismos apparaît également dans un autre texte : l’Épître aux Hébreux, dans laquelle il est écrit ceci : "Après avoir, autrefois, à plusieurs reprises et de plusieurs manières, parlé à nos pères par les Prophètes (dont Moïse), Dieu, dans les derniers temps, nous a parlé par le Fils, qu'il a établi héritier de toutes choses, par lequel il a aussi créé le monde et qui, étant le reflet de sa gloire et l'empreinte de sa personne, et soutenant toutes choses par sa parole puissante, a fait la purification (katharismos) des péchés et s'est assis à la droite de la majesté divine dans les lieux très-haut" (Hébreux 1:3). Ces mêmes "lieux très hauts" que virent Moïse, Aaron et les anciens d'Israël. Et "le Fils" dont nous parle l’Épître aux Hébreux n'est autre que cet enfant que Marie et Joseph venaient présenter "au Seigneur" dans le Temple, après avoir scrupuleusement respecté les ordonnances thoraïques exigées pour la naissance d'un fils. 

Et qu'en est-il de la quatrième mention du mot "tohar" ? Celle-ci se trouve dans un Psaume d'Ethan l'ezrahite qui écrit : "Car je dis : la bonté a des fondements éternels. Tu établis ta fidélité dans les cieux. J'ai fait alliance avec mon élu, voici ce que j'ai juré à David, mon serviteur. J'affermirai ta postérité pour toujours et j'établirai ton trône à perpétuité. Les cieux célèbrent tes merveilles, ô Éternel, et ta fidélité dans l'assemblée des saints, car qui dans le ciel peut se comparer à l'Eternel ?" (Psaume 89:1 à 6). Lorsque le Psalmiste fait mention de "la postérité de David", c'est bien entendu du Massiah dont il parle, le Seigneur Jésus-Christ. Postérité qui sera affermie "pour toujours". Dieu dit à David : "J'établirai ton trône à perpétuité". Or, au verset quarante-cinq, le Psalmiste dit encore, parlant de David : "Tu as mis un terme à sa splendeur (tohar) et tu as jeté son trône à terre". David connut effectivement une période d'exil, lors de son règne. Mais celui-ci est cependant qualifié de "splendeur". Un mot que Moïse avait utilisé pour parler de la sainte présence de Dieu sur la Montagne. Alors, faut-il voir ce qualificatif comme désignant le règne de David… ou celui de sa postérité ? Peut-être les deux ! Mais quel lien peut-il y avoir entre la "splendeur" (ou la sanctification) du règne de David et cette sanctification de la femme enceinte ? On touche ici à un mystère ("mustérion" en grec - Colossiens 2:3). La réponse se trouve peut-être dans la bouche de Salomon, fils de David, roi d'Israël : "Maintenant, Éternel, Dieu d'Israël, observe la promesse que tu as faite à David, mon père, en disant : Tu ne manqueras jamais devant moi d'un successeur sur le trône d'Israël, pourvu que tes fils prennent garde à leur voie et qu'ils marchent dans ma loi comme tu as marché en ma présence" (1 Rois 8:25 / 2 Chroniques 6:16).

"Pourvu que tes fils… marchent dans ma loi comme tu as marché en ma présence". C'est ce que firent Joseph et Marie lorsqu'ils vinrent au Temple : "Et quand les jours de leur purification furent accomplis, selon la loi de Moïse, Joseph et Marie le portèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur, suivant ce qui est écrit dans la loi du Seigneur… et pour offrir en sacrifice deux tourterelles ou deux jeunes pigeons, comme cela est prescrit dans la loi du Seigneur" (Luc 2:21 à 24). Mais pourquoi est-il fait mention de "leur" purification ? Usuellement, la purification rituelle requise ne concernait que la femme. Pourquoi Joseph était-il concerné par celle-ci ? Ce n'est bien sûr qu'une opinion personnelle, mais il est possible que ce soit Joseph lui-même qui ait assisté Marie pendant son accouchement. Ayant été au contact direct du sang, il lui fallait alors suivre le protocole de purification prévu avant de pouvoir se rendre au Temple. Preuve, peut-être, si cette interprétation est juste, qu'un simple "détail" peut apporter une information "de taille" à la compréhension du texte. Pour que leur fils Yeshoua puisse être appelé "fils de David", il fallait d'ailleurs que tout ce qui est prescrit par la loi de Moïse concernant la loi de purification soit scrupuleusement accompli dans les moindres détails. Ce qui fut fait (Luc 2:39). C'est pourquoi, Luc a pu écrire : "Il sera grand et sera appelé Fils du Très-Haut et le Seigneur lui donnera le trône de David son père" (Luc 1:32). Le règne de Salomon, "fils de David", en fut une préfiguration selon qu'il est écrit : "Salomon s'assit sur le trône de David, son père, et son règne fut très affermi" (1 Rois 2:12). Je reviens un instant à ce dont j'ai parlé en introduction de cet article. Le but étant de comprendre ce que dit vraiment le texte biblique et la façon dont il était perçu, compris par les apôtres du Seigneur et leurs contemporains. Nous sommes ici dans un contexte "vétérotestamentaire" (la Nouvelle Alliance n'est pas encore instituée). Lorsque Jésus fut présenté au Temple, il est cependant fait mention de Siméon qui était "un homme juste et pieux qui attendait la consolation d'Israël et le Saint-Esprit était en lui" (Luc 2:25). Petite parenthèse : il est à noter qu'un texte néotestamentaire affirme qu'un homme vivant sous l'Ancienne Alliance pouvait être "rempli de l'Esprit", ce que réfutent certains enseignants à l'encontre de ce que dit la Bible. D'autre part, un homme "rempli de l'Esprit" attendait "la consolation d'Israël", preuve que l'un et l'autre ne sont pas incompatibles. Je ferme la parenthèse. 

J'avais fait mention, dans la première partie de cet article, d'un "mystère dans lequel sont cachés tous les trésors de la sagesse et de la science" (Colossiens 2:3). Cette sagesse avait été accordée à Salomon, fils de David, à sa demande (1 Rois 3:5 à 12). Et voici ce que Salomon dit à Dieu : "Tu as traité avec une grande bienveillance ton serviteur David, mon père, parce qu'il marchait en ta présence dans la fidélité, dans la justice et dans la droiture de cœur envers toi, tu lui as conservé cette grande bienveillance et tu lui as donné un fils qui est assis sur son trône comme on le voit aujourd'hui" (1 Rois 3:6). Cet "aujourd'hui" a une portée à la fois prophétique et eschatologique. Je reprends ici le texte de l'Epître aux Hébreux citée plus haut (Hébreux 1:3)"Dieu, dans les derniers temps, nous a parlé par le Fils". Le "fils de David" "fait la purification des péchés et s'est assis à la droite de la majesté divine dans les lieux très-hauts". Ces mêmes "lieux très hauts" que virent Moïse, Aaron et les anciens d'Israël, et qui étaient d'une pureté immaculée. Et "le Fils" dont nous parle l’Épître aux Hébreux n'est autre que cet enfant que Marie et Joseph venaient présenter "au Seigneur" dans le Temple après avoir accompli leur purification. On pourrait s'attarder longuement sur ces textes mais ce qui en ressort, pour le sujet qui nous intéresse, c'est la stricte obéissance des parents de Jésus à ce qui était requis par la Parole de Dieu. C'est par cette obéissance que Jésus put, plus tard, exercer son ministère terrestre. Si ses parents n'avaient pas observé toutes les recommandations de la Parole de Dieu, cela aurait pu être reproché à Jésus et l'aurait discrédité auprès de ses auditeurs. La stricte observance des recommandations bibliques des parents de Jésus allait donc avoir un impact direct sur la génération suivante, voire sur les générations à venir. Elle pouvait permettre, ou non, la réalisation des plans de Dieu pour les générations suivantes et le Salut du Monde. 

Quelques autres cas 

Ainsi, des thèmes aussi éloignés comme la pratique des recommandations requises pour la période suivant un accouchement ou la purification de la lèpre ont été abordés par le biais de mêmes vocables. D'autres présentent de mêmes similitudes. Le mot "tohorah" recouvre des formes très diverses de "purification". Il peut concerner des formes de maladies cutanées (Lévitique 13 et 14) assimilées à "la lèpre". Il est utilisé pour spécifier le temps de "purification" après un accouchement d'un garçon (Lévitique 12:4) ou d'une fille (Lévitique 12:5). Ainsi, ce texte nous apprend que la durée de temps de purification de Marie, mère de Jésus, après son accouchement fut de trente-trois jours, période requise pour un enfant mâle (Lévitique 12:4 / Luc 2:22). Il est également mentionné dans le cas où un sacrificateur serait guéri d'une maladie vénérienne (gonorrhée - Lévitique 15:2, 13). Lorsqu'Ezéchias réinstaura la fête de Pessah (la Pâque), une partie du peuple se rendit à la fête pour y participer sans s'être préalablement purifié (tohorah) (2 Chroniques 30:19). A l'époque de Néhémie, lors du Retour de l'exil, les lévites servant au Temple observaient tout ce qui concernait le service de Dieu et les purifications (tohorah) requises. "Les chantres et les portiers remplissaient aussi leurs fonctions selon l'ordre de David et de Salomon, son fils" (Néhémie 12:45). Il est également fait mention de la "purification" (tohorah) d'un nazir (naziréen - Nombres 6:9) qui aurait été en contact avec un mort. Il se purifiera en se rasant la tête le septième jour. Lorsque le Temple que vit Ezéchiel sera édifié, cette période de sept jours devra également être respectée comme période de purification (tohorah) par les sacrificateurs s'étant approché d'un parent proche décédé (Ezéchiel 44:25) : un père, une mère, un fils, une fille, un frère, une sœur, à condition que celle-ci n'ait pas connu d'homme (lo ayetah lè ish). Les traductions donnent généralement : "qui n'a pas été mariée". Mais la traduction littérale est bien : "qui n'a pas été à un homme", ce qui couvre un sens plus large et est peut-être plus fidèle à "l'esprit" du texte. Il est à noter que l'épouse du sacrificateur n'est pas mentionnée. Lorsque celle d'Ezéchiel décédera, il lui sera cependant demandé de ne pas porter le deuil de sa femme (Ezéchiel 24:15 à 19). "Tohorah" est donc utilisé dans des contextes fort différents les uns des autres. Le lien commun semble pourtant le contact avec autrui. Que ce soit la naissance, la mort, le naziréat, le service au Temple. La tohorah concerne à la fois des naziréens, des lévites, des sacrificateurs, comme des gens du peuple, tout comme dans un cas de guérison d'une maladie vénérienne contractée par un sacrificateur (ce qui laisse entendre que même un sacrificateur pouvait contracter ce genre de maladie)

Pur comme de l'or

Je terminerai cette partie par un apax. En effet, le mot "miklah" n'apparaît qu'une seule et unique fois dans toutes les Ecritures (2 Chroniques 4:21). Et c'est un mot féminin ! Louis Segond le traduit par "très pur", Ostervald et Darby par "parfaitement pur", et la King James par "perfect gold". Nous avons donc ici un or d'une pureté inégalée dans toute la Bible. Un or qui rappelle celui que l'on trouve mentionné dan les Écrits néotestamentaires, et notamment lorsqu'il est fait mention de la Nouvelle Jérusalem. "La ville était d'or pur (chrusios katharos) semblable à du verre pur (katharos)" (Apocalypse 21:18). L'Apocalypse mentionne à plusieurs reprises ce métal précieux, mais c'est ici la seule mention qui en est faite d'un "or pur". Ceci n'est pas sans rappeler ce que dira l'apôtre Paul sur les matériaux utilisé pour construire "l'édifice de Dieu" (1 Corinthiens 3:9). "Avec de l'or, de l'argent, des pierres précieuses, du bois, du foin, du chaume" (1 Corinthiens 3:12). 
 


L'impureté dans le Nouveau Testament  

Et qu'en est-il de l'impureté dans les Écrits du Nouveau Testament ? Les Évangiles synoptiques (Matthieu, Marc et Luc) font mention de l'impureté uniquement pour désigner des esprits impurs ou des démons. Les Actes en font également mention dans ce sens (Actes 5:16 / 8:7), tout comme le livre de l'Apocalypse (Apocalypse 16:13). Paul, quant à lui, parle de l'impureté des convoitises du cœur (Romains 1:24) liée à l'iniquité (Romains 6:19) ou à l'idolâtrie (2 Corinthiens 6:17), ou encore à l'impudicité, "la débauche et les dérèglements" (2 Corinthiens 12:21). Cependant, dans un autre contexte, cette notion peut être aléatoire  (Romains 14:14) et relève d'un jugement personnel lié à la conscience de chacun. 

Paul reprend quelques exemples d'impureté (Galates 5:19) auxquels peuvent se joindre "la cupidité" (Éphésiens 4:19 / 5:3) et "la recherche de la chair" (2 Pierre 2:10). Ces choses empêcheraient le pratiquant d'entrer dans le Royaume de Dieu (Éphésiens 5:5) qui serait ainsi destiné aux ténèbres éternelles (Jude 1:13). Paul rappelle également qu'une prédication peut avoir des motifs frauduleux (1 Thessaloniciens 2:3) par cette même cupidité. Séductrice, l'impureté est une œuvre purement démoniaque (Apocalypse 16:13) et peut se manifester de façon très appuyée par une personne en particulier (Apocalypse 17:4). Une ville incarne tout particulièrement sa pratique : Babylone ! Une ville qui incarne, à elle seule, tout ce que l'Écriture peut condamner comme débauches et comme pratiques impures (Apocalypse 18:2). Elle doit donc être proscrite parmi ceux qui professent la foi en pratiquant plutôt la sanctification (1 Thessaloniciens 4:7). Si les notions lévitiques de pureté et d'impureté étaient connues des disciples d'origine juive, elles étaient ignorées de ceux d'origine grecque ou d'autres peuples. Paul fait principalement appel, en s'adressant aux communautés, à leur bon sens moral. Dans son Épître aux Romains, Paul écrit que deux choses sont à l'origine de l'immoralité : l'idolâtrie et les faux raisonnements (Romains 1:21 à 32). Alfred Kuen, dans sa traduction "Parole Vivante", donne une description très évocatrice. Il parle de "raisonnements insensés, de spéculations futiles", décrivant les victimes de ces "faux raisonnements" comme étant "les jouets des passions et des convoitises", qui se sont laissé "enliser dans l'immoralité, de sorte qu'ils ont avili leurs propres corps". Dieu les ayant "livrés à des passions avilissantes" dont "leur être supporte les conséquences que leurs égarements méritaient". Il ajoute qu'Il "les a livrés à l'empire de leurs instincts corrompus, les laissant commettre les infamies que leurs esprits obnubilés imaginaient et que leurs sens pervers réclamaient" (Romains 1:21 à 28, version Parole Vivante). Une description sans détour de ce à quoi un être humain peut livrer son âme. Cet être humain créé à l'image de Dieu qui ne peut parfois même plus en présenter ne fut-ce qu'un pâle reflet. 

L'impureté dans l'Ancien Testament 

J'en viens maintenant au thème de l'impureté dans l'Ancien Testament. Les deux thèmes de la pureté et de l'impureté sont toujours étroitement liés et l'on retrouve ces mêmes notions dans l'Ancienne et la Nouvelle Alliance. Par exemple, la réticence de l'apôtre Pierre à entrer dans la maison d'un païen (Actes 10) ou les rites de purification que s'impose l'apôtre Paul avant de pénétrer dans le Temple. Il ne faudra donc pas s'étonner de retrouver sujets, références bibliques et thèmes dans cette partie, car on ne peut aborder l'un sans traiter l'autre. l'Ecriture traite de l'impureté sous diverses formes et sous différents vocables. Le vocabulaire utilisé par les différents auteurs bibliques est riche et semble parfois faire usage de synonymes, tant un même mot peut se retrouver dans des contextes différents, comme une même chose peut être désignée par des mots différents. Mais en réalité, le choix des mots a été pesé et soupesé, il ne s'est pas fait au hasard ou selon l'envie du moment. Les Ecritures sont pleinement inspirées et l'usage d'un vocable plutôt qu'un autre a une signification. Celle-ci n'est pas toujours apparente au premier abord. La raison peut même, parfois, paraître incompréhensible. L'Auteur semble vouloir toujours nous rappeler que nous ne pouvons pénétrer dans les profonds mystères de l'Ecriture sans son assentiment, nous ne sommes en mesure d'en comprendre le sens véritable qu'avec l'aide de son Saint-Esprit. 

J'ai volontairement choisi de traiter le sujet de l'impureté dans l'Ancien Testament dans la dernière partie de cet article pour une raison simple, c'est que l'on touche ici à des sujets sensibles. Je tiens à réitérer ce que j'ai dit en introduction : mon but est de chercher à comprendre ce que dit (vraiment) l'Ecriture. Je ne me positionne qu'en tant qu'observateur. Il me faudra cependant aborder des sujets délicats. Mon désir est de le faire avec le plus d'objectivité possible. Mais il me faut reconnaître que les textes bibliques utilisent parfois des termes assez "crus". Le sujet des menstruations est largement abordé et est présenté par un vocabulaire varié, qui les associe parfois à d'autres thèmes d'une façon qui peut paraître choquante. A ce jour, après avoir lu et relu, avoir creusé, cherché à comprendre ce que disent les textes, j'avoue être encore perplexe et n'avoir compris qu'une partie de tout ce qu'ils ont a nous dire.

Ce qui est commun aux femmes  

Je débuterai cette partie par ce que Segond appelle "ce qui est commun aux femmes" (Genèse 31:35). En tant qu'homme, je ne suis pas le mieux placé pour aborder ce sujet. En tant qu'étudiant de la Bible, je l'aborde comme je le ferais d'un quelconque autre thème des Ecritures. Les menstruations sont nommées de différentes façons et par différents termes, et on retrouve ce sujet à de nombreuses reprises dans les textes. Ce qui peut choquer, d'un premier abord, c'est la façon dont certains textes les associent à d'autres comme étant profondément répugnantes. Une fois encore, il faut, pour le comprendre, se replonger dans le contexte moyen-oriental d'il y a trois mille ans et plus. L'absence totale de moyens de protection comme nous les connaissons aujourd'hui, la chaleur extrême, les odeurs exacerbées, tout cela joue un rôle dans la façon d'appréhender ce qui demeure un phénomène naturel propre à l'humanité, et ce depuis l'aube de son histoire. Eve (Hava de son vrai nom, ce qui signifie "la vivante") ayant été mère, eut forcément des menstruations. Elle fut donc la première femme de l'Histoire a connaître ce désagrément physiologique. Et comme elle fut "la mère de tous les vivants" (Genèse 3:20), il lui fallut transmettre à ses filles cet "héritage" propre à la gent féminine. 

L'exemple le plus flagrant, dans les Ecritures, d'une femme ayant ses menstruations est celui de Rachel, fille de Laban qui, ayant dérobé les teraphim (dieux domestiques) de son père, les a dissimulés sous la selle sur laquelle elle est assise. Prétextant avoir "ce qui est commun aux femmes", elle s'excuse de ne pouvoir se lever devant lui (Genèse 31:35). Rachel prétend ainsi avoir ses règles. L'expression qu'elle utilise est "derek nashim" (littéralement "le chemin des femmes"). On notera ici que, par pudeur, Rachel ne prononce pas de mots désignant directement les menstruations devant son père mais utilise une expression commune qui les désigne de façon imagée. L'hébreu biblique utilise différents mots pour désigner les menstruations. Entre autres, le mot "niddah", ce qui peut se traduire par "impureté, époque régulière, flux menstruel". Les textes thoraïques (rédigés par Moïse) réglementent la conduite de la femme menstruée. On peut imaginer combien cette période récurrente devait être inconfortable pour elle. Outre l'indisposition et l'inconfort, les restrictions qui lui étaient imposées la gênaient dans sa vie quotidienne, sans compter l'éventuelle irritation de son mari qui voyait, pour un temps défini, sa virilité mise en repos forcé, les relations intimes étant, pendant les périodes de menstruations, prohibées. 

"Tu ne t'approcheras pas d'une femme pendant son impureté menstruelle pour découvrir sa nudité" (Lévitique 18:19 / 20:18). Lorsqu'on lit l'expression "découvrir sa nudité", il faut bien évidemment comprendre : "avoir des relations sexuelles". Mais le texte biblique revêt ici un aspect subtil. Il a là un caractère préventif. "Tu ne t'approcheras pas" peut également se lire : "Ne te mets pas dans une situation de proximité qui puisse éveiller un désir que tu ne pourras pas, ensuite, réfréner". Ainsi, le texte ne fait pas qu'interdire l'acte en lui-même. Il conseille intelligemment les époux en l'anticipant. Ce verset est directement suivi d'un autre que l'on peut facilement lire sans faire le lien avec le précédent. "Tu n'auras pas commerce avec la femme de ton prochain pour te souiller avec elle" (littéralement, "shekabeteka lezara", "tu ne coucheras pas pour ta semence", Lévitique 18:20). On est ici, clairement, dans un contexte d'adultère. Ces deux versets pourraient paraître comme deux prescriptions différentes liées à la sexualité mais n'ayant pas d'autre lien entre eux. Pourtant, une lecture attentive révèle qu'il y en a un. En réalité, ces deux commandements peuvent être étroitement liés. Un mari se voyant refuser, même momentanément, les faveurs de son épouse légitime, pouvait avoir le désir d'affirmer, ailleurs, sa virilité. L'adultère le conduisant ainsi à une autre forme "d'impureté". Les relations avec "la femme de son frère" étaient bien évidemment proscrites. Une épouse, soumise aux insistances prolongées de son mari, pouvait être tentée d'aiguiller celui-ci vers sa sœur (Lévitique 18:18 / 20:21), avec qui un accord mutuel préalable aurait été passé. Comme ce fut le cas entre Rachel et Léa (Genèse 30:15 / Lévitique 18:18), mais dans un autre contexte et pour d'autres raisons. Si toutefois, un homme venait à avoir des relations intimes avec sa femme pendant sa période menstruelle, il serait "impur" pendant sept jours (Lévitique 15:24). Si un homme avait une relation avec une femme autre que la sienne, et que cette femme soit menstruée et que son sang vienne sur lui, l'homme serait impur pendant sept jours. Tout lit sur lequel il se coucherait serait également impur. Si cet homme était marié et qu'il retournait dans le lit conjugal, celui-ci était souillé à son tour, et il lui aurait fallu le considérer comme impur alors que son épouse l'ignorait totalement. Toute personne touchant un objet impur devenait elle-même impure. L'épouse légitime devenait donc impure sans le savoir. Même par le simple fait de s'être couché dans un lit qui l'était devenu par l'impureté de son mari. La situation pouvait devenir beaucoup plus compliquée encore lorsque l'épouse apprenait, après examen médical, qu'elle avait contracté une maladie vénérienne alors qu'elle était restée fidèle à son mari. Peut-être est-ce, entre autres, à cela que pensait l'auteur de l'Epître aux Hébreux lorsqu'il écrivit : "que le mariage soit honoré de tous, et le lit conjugal exempt de toute souillure" (Hébreux 13:4).

L'apôtre Paul écrit aux Corinthiens : "Ni les débauchés, ni les adultères n'hériteront le royaume de Dieu" (1 Corinthiens 6:9, 10). La question peut donc se poser ici : ces recommandations sont-elles obsolètes de par le fait que la loi mosaïque n'a plus aucune incidence sur une personne vivant sous la Nouvelle Alliance ou… nous faut-il toujours tenir compte de ces directives ? Certains (hommes ou femmes) rechigneront naturellement à avoir des relations intimes durant la période de menstruation. D'autres n'en tiendront pas compte. Il est à noter que des études ont montré que la pratique répétée de relations intimes durant les périodes de menstruation pouvait favoriser les cancers de l'utérus. On pourrait donc voir, entre autres, dans ces textes de l'Écriture, des directives prophylactiques visant à préserver la santé de la femme. On peut considérer les lois mosaïques comme obsolètes, les conséquences de leur transgression n'en sont pas moins effectives. 

Le mari se doit de tenir compte de la réticence de son épouse et ne peut l'astreindre, contre son gré, au "devoir conjugal". Certains hommes, par pur égoïsme et par un total manque de respect à l'égard de leur épouse ou compagne, n'en tiendront pas compte, lui imposant ainsi une soumission passive. Au risque de lui infliger, à long terme, de conséquents soucis de santé. C'est pourquoi il est écrit : "Maris, aimez vos femmes et ne vous aigrissez pas contre elles" (Colossiens 3:19), comme par exemple, lorsque momentanément, elle se refuse à l'étreinte. Il est dit également : "Maris, aimez vos femmes comme Christ a aimé l'Eglise et s'est livré lui-même pour elle afin de la sanctifier en la purifiant et en la lavant par l'eau de la parole" (Éphésiens 5:25). L'apôtre Paul aborde ainsi deux façons différentes, pour le mari, de respecter le refus momentané de son épouse à l'étreinte conjugale. La première est une résignation irritée. La seconde est une acceptation volontaire motivée par l'amour qu'il porte à son épouse. Un amour qui se manifeste par le respect de sa personne dans sa globalité, corps, âme et esprit, ne pourra que renforcer son affection pour lui. Celui-ci retrouvera alors, en son temps, l'étreinte d'une femme aimante, rassurée par le respect que lui aura prodigué volontairement son mari. Paul poursuit en disant : "C'est ainsi que le mari doit aimer sa femme comme son propre corps. Celui qui aime sa femme s'aime lui-même" (Éphésiens 5:28). Et plus loin encore : "Du reste, que chacun de vous aime sa femme comme lui-même et que la femme respecte son mari" (verset 33). Mais il est dit également ailleurs, "Ne vous privez pas l'un de l'autre si ce n'est d'un commun accord pour un temps afin de vaquer à la prière, puis retournez ensemble, de peur que Satan ne vous tente en raison de votre manque de maîtrise" (1 Corinthiens 7:5), car l'un et l'autre des époux contribue, chacun pour sa part, à l'épanouissement du couple.  
 


Indécence et nudité  

Le mot "ervah" (nudité) peut signifier à la fois une "apparence incorrecte, une nudité honteuse (consentie ou infligée, Ézéchiel 22:10)", "l'indécence", mais aussi désigner "les organes génitaux féminins" (Ézéchiel 16:37). Delphine Horvileur parle même de "porosité"Ce mot "ervah" a pour racine "arah", qui signifie "s'exposer, se mettre à nu, se dénuder"Étonnement, il peut également désigner un territoire géographique plus "perméable" à l'envahisseur. On retrouve ici la notion de "porosité". Joseph, surintendant d'Égypte, en parlera comme des "lieux faibles du pays" (Genèse 42:9, 12). Dans ce chapitre 49, Joseph, paré comme un égyptien, reçoit ses frères venus quémander du blé pour contrer la famine qui sévit sur toute la région, jusqu'en terre de Canaan. Feignant de les prendre pour des espions venus explorer les frontières en vue d'une future invasion, Joseph l'égyptien compare "les lieux faibles du pays" à "un lieu possible d'intrusion hostile". Lorsqu'un avion militaire survole l'espace aérien d'un autre pays, ne dit-on pas qu'il "viole" l'espace aérien de celui-ci ? La métaphore est d'autant plus parlante que l'Egypte est considérée, dans la tradition juive, comme "l'utérus" dans lequel fut conçu le peuple hébreu. 

"Ervah" est mentionné pour la première fois dans le chapitre 9 du livre de la Genèse. Il y est dit que "Cham, père de Canaan, vit la nudité de son père" (Genèse 9:22, 23). Cette "ervah" de Noé fut à la fois découverte par son plus jeune fils et recouverte par les deux autres, Sem et Japhet (Genèse 9:23). Ces textes introductifs (de la liste d'occurrences où ce mot apparaît) sont importants pour la compréhension de ce mot "ervah"car les autres mentions, notamment dans le livre du Lévitique, sont directement liées à cet événement particulier. Le texte biblique stipule cependant que toutes ces choses, proscrites par la loi thoraïque, étaient pratiquées par les nations alentours. Par les Égyptiens dont ils avaient quitté le pays ainsi que dans celui des Cananéens dont ils allaient s'emparer. Les Hébreux auraient pu être tentés d'imiter les mœurs des nations voisines. Les situations de relations intimes sont ensuite mentionnées de façon spécifique pour le père et la mère (Lévitique 18:7), la belle-mère (18:8), la sœur ou la demi-sœur (d'un précédent ou d'un second mariage, (18:9, 11), la fille de ses enfants (18:10), la tante maternelle (18:12, 13 / 20:19) ou paternelle (20:19), l'oncle paternel (18:14 / 20:20), la belle-fille (18:15) ou la belle-sœur (18:16). D'autres situations sont également proscrites, comme d'avoir des relations à la fois avec la mère et sa fille (18:17), ou avec la ou les filles des enfants de cette femme (ses petites-filles, 18:17). Ces pratiques étant courantes dans les peuples alentours, qu'ils soient cananéens ou égyptiens. Les Hébreux sont appelés à ne pas imiter les pratiques des peuples qui les entourent. L'âge n'est pas ici spécifié et l'on serait tenté, de prime abord, de penser à des personnes adultes consentantes. Néanmoins, il faut également envisager que ces recommandations puissent inclure des mineurs d'âge, y compris de très jeunes enfants. 

Un autre exemple de l'utilisation de ce mot se trouve dans le récit de la vie du roi Saül. Celui-ci reproche à Jonathan, son fils, l'amitié qui lie les deux jeunes gens, allant jusqu'à traiter David de "bâtard"*. "Alors la colère de Saül s'enflamma contre Jonathan et il lui dit : Fils pervers et rebelle, ne sais-tu pas que tu as pour ami le fils d'Ishaï, à ta honte et à la honte de la nudité de ta mère ?" (1 Samuel 20:30, Darby). Plusieurs versions "omettent" le mot "nudité", mais il est présent dans le texte ("ouleboshet erwat"). Saül fait ici allusion aux conditions "particulières" (et assez sombres) dans lesquelles fut conçu celui qui allait devenir le roi David. Celui-ci aurait pu être un "enfant naturel" d'Ishaï. Ce qui expliquerait le mépris non dissimulé que Ishaï et ses fils manifestaient envers David. Mais pourquoi cette allusion à la nudité (ervah) ? La version TOB traduit même : "à ta honte et à la honte du sexe de ta mère" (1 Samuel 20:30). Ces "conditions particulières" devaient être connues de Saül et de Jonathan, puisqu'il y fait allusion ouvertement. On aurait pu reprendre là les paroles que prononça Moïse, mais dans d'autres circonstances : "Certainement, la chose est connue" (Exode 2:14). D'autre part, "S'approcher d'une proche parente pour découvrir sa nudité" pouvait engendrer une nouvelle descendance.

Ainsi, il est donc écrit qu'il n'était pas permis de s'approcher d'une parenté, proche ou éloignée, pour "découvrir sa nudité (ervah)" (Lévitique 18:6). Sans aller jusqu'aux relations sexuelles proprement dites, le simple fait de soulever le vêtement ou de l'entrouvrir était proscrit. Ce qui nous semble relever du simple bon sens et du respect d'autrui n'était pas, alors, d'une évidence même. Ni pour les Hébreux, ni pour les nations environnantes. Il était de même interdit de "dénuder" son père ou sa mère, ou la seconde épouse de son père car, dit le texte, cela revient à découvrir la nudité de son propre père (Lévitique 18:8). On retrouve ici "la faute" de Cham. La transgression d'une éthique qui n'est pas encore définie mais qui se construira, plus tard, sur le souvenir de ce "découvrement". Ainsi, la liste de la parentèle dont il est proscrit de découvrir la nudité est décrite en détail dans les chapitres 18 et 20 du livre du Lévitique, avec des conséquences et des sanctions plus ou moins graves selon les cas. Vient alors la question du découvrement proprement dit. Quelle en est la limite ?  Jusqu'où la décence peut-elle tolérer la nudité d'un membre du corps ? Au dix-neuvième Siècle, il était indécent, pour une femme, de montrer ses chevilles à un homme. Le buste était couvert du cou jusqu'au poignet. L'indécence est-elle dans le regard ou dans le corps qui s'affiche ? Si la pudeur a un visage, elle se complaît à se cacher les yeux. A la lecture de ces textes, on peut s'interroger sur la nature des relations que les membres d'une famille peuvent entretenir. Les textes bibliques nous énoncent des situations que nous n'aurions peut-être même pas imaginées. Pourquoi les énoncer ? Parce que ce qui y est proscrit était pratiqué. Cela oblige donc le lecteur a ouvrir les yeux sur une réalité et une facette de l'être humain qu'il n'aurait peut-être même pas soupçonnées. Derrière l’impeccabilité de l'apparence se cache parfois la plus sournoise des hypocrisies. 

Ces textes du Lévitique sont souvent totalement ignorés de la majorité de ceux qui se revendiquent de l'autorité plénière de la Bible. Ils ne sont lus, souvent en diagonale, que par une petite minorité qui pratiquent la "lecture de la Bible en un an". Généralement, ils sont lus comme on observe le paysage à travers le hublot d'un avion de ligne. Vite et de loin. Pour beaucoup, les Écrits de l'Ancien Testament sont même désormais obsolètes. Il n' y a donc plus lieu de s'en enquérir. "Aime et fait ce qu'il te plaît" aurait dit Saint-Augustin. Une maxime qui, bien que bonne en soi dans le sens voulu par son auteur, a été détournée de son sens initial. Reformulant la définition du mot "aimer", certains n'en retinrent que sa conclusion : "fais ce qu'il te plaît". Il faut également relever que l'usage premier du mot "ervah" apparaît dans un contexte d'ivresse. Noé s'est enivré et s'est retrouvé nu sous sa tente (Genèse 9:21). Or, impudicité et ivresse sont souvent liées (Apocalypse 17:1, 2, 4). Mais, était-ce ainsi que les apôtres et les premiers disciples de Christ concevaient les choses ? Eux qui avaient été élevés dans ces principes se sont-ils soudains sentis "délivrés" de ce "joug pesant de la Thora" ? Ont-ils soudain considéré que ces pratiques des nations leur étaient maintenant accessibles à nouveau ? Le "fardeau doux et léger" dont parlait le Seigneur Jésus était-il dénué de toute restriction morale ? Avec le temps, cette impudicité s'étant étendue à la communauté d'Israël, la Gloire de Dieu, la Shekhinah, se retira du Temple. Elle s'éloignera même de Jérusalem, sous les yeux médusés du prophète Ézéchiel. Jérémie se lamentera sur le sort de Jérusalem à qui Dieu reproche l'impudicité (Lamentations 1:8, 9). Dieu parle à Jérusalem en des termes tantôt affectueux, tantôt de reproches, comme à une femme infidèle (Ézéchiel 16:8 ,36, 37) qui aurait livré sa nudité à tous ses amants qui s'en sont maintenant détournés (Ézéchiel 23:18, 23), Dieu ayant pourtant veillé à lui fournir "la laine et le lin" pour couvrir cette nudité qu'elle se plaisait tellement à exhiber aux yeux des nations avec lesquelles elle s'était prostituée (Osée 2:9). Dans chacune de ces références, on retrouve ce mot "ervah", comme pour signifier une forme particulière d'impureté. Une forme d'impudicité malsaine qui se doublerait d'une souillure morale. Mais ce thème revêt bien d'autres vocables.  

*Ce sujet est développé dans l'article "David, né dans l'iniquité" 

Ga'al : la souillure du sang 

Comme je l'ai dit au début de cet article, les notions de pureté et d'impureté sont décrites, dans les Écritures, par une large palette de vocabulaire. La Bible est toujours très précise dans ce qu'elle décrit, mais le sens n'en est pas toujours clair. Ce n'est parfois que dans une situation particulière que cette précision révèle sa nécessité. C'est alors que l'on peut apprécier, à leur juste valeur, ces subtilités de langage. Cependant, leur usage et certaines comparaisons peuvent paraître choquantes, voire inacceptables. C'est pourquoi, l'approche de ces textes est fort délicat. Une démarche qui se veut la plus exhaustive possible ne peut écarter ces passages sous prétexte qu'ils sont susceptibles de choquer ou de déranger. Ces textes font partie de la Parole de Dieu. Il nous faut tenir compte du contexte immédiat dans lequel ces choses ont été écrites et les considérer avec le recul nécessaire. Ces choses ont été écrites, rapportant des faits qui se sont produits dans des contextes bien définis. Il est nécessaire d'en tenir compte et de prendre, à leur égard, suffisamment de recul pour pouvoir les observer avec détachement. 

En voici quelques exemples. 

Le mot "Ga'al" peut désigner une "souillure" contractée par le contact avec le sang d'une autre personne (Lamentations 4:14), comme par celui d'un adversaire dans le combat (Esaïe 59:3). Les vêtements peuvent également être souillés par le sang (Esaïe 63:3). Dieu dira, par la bouche de son serviteur le prophète Ézéchiel, que les habitants du pays d'Israël ont souillé le pays par leurs actions et leur impiété, et que celle-ci a été, devant Lui, "comme la souillure (tumah) d'une femme pendant son impureté (niddah)" Ézéchiel 36:17). Au verset 18, Ézéchiel fait référence au sang (dam) versé par le meurtre et la guerre, faisant ainsi une comparaison entre le sang qui s'écoule lors des menstruations et le sang qui est versé lors d'un assassinat ou d'un conflit armé. "Comme la souillure (tumah) d'une femme pendant son impureté (niddah). Alors j'ai répandu ma fureur sur eux à cause du sang qu'ils avaient versé dans le pays, et des idoles dont ils l'avaient souillé" (Ézéchiel 36:18). Le mot "ga'al" peut également désigner "le vengeur de sang" (Nombres 35:12, 19). Une personne ayant été assassinée pouvait être "vengée" par un proche ou un membre de la famille. cette notion de "souillure" peut également s'appliquer à une cité. Le prophète Sophonie s'adresse à Ninive en parlant d'elle comme "d'une ville souillée (ga'al)" (Sophonie 3:1). Et Dieu reproche à son peuple de "souiller (ga'al) sa table avec des aliments impurs" (Malachie 1:7, 12) alors que Daniel, à la cour de Babylone, refusera de se souiller (ga'al) avec des aliments offerts à des divinité (Daniel 1:8). Étonnamment, ce mot est également utilisé pour parler des sacrificateurs qui ne purent retrouver leurs titres généalogiques, et qui furent, pour cela, exclus (ga'al) du sacerdoce lévitique (Esdras 2:62 / Néhémie 7:64). Là encore, il n'est pas aisé d'y déceler une quelconque analogie. Si ce n'est, peut-être, le sang. Par exemple, la consommation d'une viande qui n'aurait pas été rituellement vidée de son sang, selon qu'il est écrit : "garde toi de manger le sang, car le sang est l'âme, et tu ne mangeras pas l'âme avec la chair" (Deutéronome 12:23). Ce que se refuse à faire Daniel. Lorsque Sophonie parle de Ninive comme d'une "ville souillée", le choix de ce vocable la désigne comme une cité sanglante. Une ville où l'on fait couler le sang. Si Dieu reproche à son peuple de "souiller sa table", c'est parce que des viandes y sont présentées sans avoir été abattues rituellement. Et si des sacrificateurs se voient exclus du sacerdoce lévitique, c'est parce qu'ils ne peuvent prouver leur ascendance lévitique qui ne peut s'obtenir que "par le sang", c'est à dire par filiation naturelle. Ainsi, des textes qui semblaient n'avoir aucun lien entre eux se voient réunis par un seul mot. Mais chacun de ces mots bien spécifiques redonne à ces textes tout leur sens. 

Tame  

Le mot le plus usité sur ce sujet, dans l'hébreu biblique, est "tame". On le trouve principalement dans le livre du Lévitique mais le prophète Ézéchiel en fait un un usage fréquent, ce qui est compréhensible, étant donné le fait que celui-ci était avant tout un sacrificateur, même si, en exil, il ne put exercer la sacrificature. Mais son message était imprégné de ce qui lui avait été enseigné dans sa prime jeunesse. Les premières références à ce mot sont dans le livre de la Genèse, qui relate le viol de Dina, la fille de Jacob, par Sichem (Genèse 34:5, 13, 27). Dans la version Segond, il est traduit par "déshonorée". En réalité, le déshonneur causé par ce viol entachait également la famille de Dina, son père et ses frères. Dina, quant à elle, se sentait "souillée" tout comme peut l'être une personne dont on a abusé. Dans le cas de Dina, il s'agit d'une "souillure" totalement involontaire, mais qui laissera sur elle une trace quasi indélébile. Une "souillure de l'âme" que la demande en mariage de son violeur ne pourra effacer. Mais le mot "tame" concerne différents domaines.

Le fait de toucher une souillure humaine (défécations, urine, perte séminale, sang provenant de menstruations), même par inadvertance, rendait impur (Lévitique 5:3). Le mot "tumah", traduit ici par "souillure", peut également signifier "impureté sexuelle, masse immonde (étron), pertes féminines, flux émanant du corps" (définition du Dictionnaire Strong). "L'impureté" peut également être contractée en touchant un animal impur (Lévitique 11:39), qu'il soit vivant ou mort (Lévitique 11:26, 28, 31). Toucher le cadavre d'un animal, même considéré comme pur, rend impur (Lévitique 15:4 à 6). Tout contact avec ce qui est impur rend impur (Aggée 2:13). Transporter un cadavre également (Lévitique 21:1). Tout objet en contact avec un animal impur est "impur". Il était donc impropre à l'usage "jusqu'au soir" (Lévitique 22:5). Un récipient dans lequel serait tombé quelque chose d'impur est souillé. Son contenu doit être répandu et le vase, brisé (Lévitique 11:33, 34). Une personne étant atteinte d'une "plaie de lèpre" (maladie cutanée qui pouvait être contagieuse) est considérée comme "impure" (contagieuse). C'est pourquoi, le "lépreux" habitera "hors du camp" (Lévitique 13:45, 46). La lèpre peut toucher des objets (Lévitique 13:59), des maisons (lévitique 14:33 à 56) dont les murs portent des traces de moisissures ou de champignons. "Telle est la loi pour la lèpre des maisons" (Lévitique 14:54, 55)

Onan et l'onanisme  

Cet article traitant de l'impureté, il ne m'était pas possible, dans une démarche qui se voulait exhaustive, d'occulter ce sujet. Il me fallait tout au moins le survoler. La décence voudrait que ce sujet ne soit abordé que dans le cadre strict de ce qu'en disent les Écritures. Celles-ci n'en fournissent cependant qu'un exemple succinct. Mais de quoi s'agit-il ? De perte ou d'écoulement de "semence" masculine, celle-ci pouvant être volontaire ou involontaire. D'un point de vue médical, il s'agit d'un phénomène purement physiologique ne souffrant aucun jugement moral quelconque. Les pertes séminales peuvent être nocturnes (se produisant pendant le sommeil) ou volontaires, ce que l'on a nommé "l'onanisme" (du nom de l'un des fils de Juda qui "répandait sa semence à terre" pour ne pas donner une descendance à son frère dont il venait d'épouser la veuve). Elles peuvent également être dues à une maladie vénérienne (ce sujet sera abordé plus loin). Si la Bible aborde ce sujet au travers d'un épisode du livre de la Genèse, c'est afin de relater un événement qui s'est produit dans la famille de Juda, l'un des douze fils de Jacob. Cet épisode a servi de support à une forme de jugement moral. Comme je l'ai dit, ce n'est pas ici l'objet de cet article. Ma démarche étant de scruter les Écritures pour en faire ressortir ce qu'elles disent à propos d'un sujet donné. Mais avant de poursuivre, il me faut faire un rapide résumé de  l'histoire de son principal intéressé (Genèse 38).  
 


Petit résumé 

Après que les fils de Jacob eurent comploté la disparition de leur jeune frère Joseph et l'avoir fait passer pour mort aux yeux de leur père, Juda "s'éloigna de ses frères" (Genèse 38:1). Il alla s'établir auprès de l'un de ses amis cananéens et prit pour femme une fille du pays dont il eut trois fils : Er, Onan et Schéla. Juda prit également une femme cananéenne pour son fils aîné. Celle-ci s'appelait Tamar. Er était un homme "méchant aux yeux de l'Eternel" et il mourut, peut-être des conséquences de son mauvais tempérament. N'ayant pas eu d'enfant, la coutume voulait que son frère épouse sa veuve. Les enfants qui naîtraient de cette union seraient considérés comme étant ceux du défunt. Juda donna donc Onan, son deuxième fils, en mariage à Tamar. Onan, ne voulant pas que ses propres enfants "portent le nom" de son frère, "se souillait à terre". Il pratiquait ce que l'on nomme "le coït interrompu", répandant sa semence sur le sol, refusant ainsi à Tamar, veuve de son frère, d'avoir des enfants. "Onan, sachant que cette postérité ne serait pas à lui, se souillait à terre lorsqu'il allait vers la femme de son frère, afin de ne pas donner de postérité à son frère" (Genèse 38:9). "Mais cela déplut à l'Eternel qui le fit mourir" (verset 10). Voyant que deux de ses fils étaient morts après avoir épousé Tamar, Juda craignit de lui donner son troisième fils en mariage. Il usa donc d'un subterfuge et renvoya sa belle-fille dans la maison de son père, lui promettant de lui donner son plus jeune fils lorsque celui-ci serait en âge de se marier. Mais les années passèrent et Juda n'était pas motivé pour célébrer de nouvelles fiançailles. Tamar, voyant que Schéla ne lui était pas donné en mariage comme cela avait été convenu, se déguisa en prostituée et se posta sur la route de Juda, son beau-père. Juda, croyant avoir affaire à une prostituée, coucha avec elle sans que celle-ci ne lui révèle sa véritable identité. Peu de temps après, il s'avéra que Tamar se trouva enceinte. L'ayant appris, Juda considérant cela comme une infidélité à son engagement, voulut faire mourir Tamar, mais celle-ci put fournir la preuve que Juda était bien le père des enfants qu'elle attendait. Juda reconnut alors sa faute. Et Tamar accoucha de jumeaux. Voilà, résumée brièvement l'histoire, d'Onan, de Juda et de Tamar. 

Coupable ou non coupable  

La véritable faute d'Onan fut probablement d'avoir refusé à Tamar ce qui était le désir légitime d'une épouse, celui d'avoir des enfants. La crainte (superstitieuse ?) de Juda fut à l'origine du subterfuge dont elle usa à son égard. Sachant qu'il ne lui serait donné qu'une seule opportunité pour obtenir une postérité (zéra), elle dut certainement choisir une période particulière durant laquelle elle se savait fertile. D'autre part, comment a-t-elle pu savoir que son beau-père s'arrêterait auprès d'une prostituée si ce n'est parce qu'elle l'avait déjà vu faire à de nombreuses reprises ?  

Les personnages pourraient facilement être taxés d'impudicité. Néanmoins, l'attitude de Juda, dans cette histoire, semble bien plus coupable que celle de son fils Onan. Pourtant, il est écrit que ce que faisait Onan "déplut fort à l'Eternel qui le fit mourir" (Genèse 38:10). Juda n'aurait pourtant pas hésité à faire brûler vive sa belle-fille parce qu'elle s'était prostituée et qu'elle était enceinte de sa prostitution (Genèse 38:24), tout en sachant qu'il n'avait pas l'intention de lui donner son troisième fils en mariage, comme il le lui avait promis. L'attitude de Juda n'était-elle pas plus coupable que celle de son fils ? Si tant est que l'on puisse porter un jugement moral sur leur attitude respective. Le jugement divin portait pourtant sur l'attitude d'Onan à l'égard de son défunt frère et de son épouse Tamar, et non sur "l'acte d'onanisme" proprement dit. Une certaine religion n'a cependant pas hésité, sur la base de cette interprétation erronée, à faire de cette pratique un "péché mortel". Force est de constater que celui qui est le plus prompt à juger n'était pas le moins coupable. La finalité de cette histoire et ses dramatiques conséquences tirent leur origine d'un fait tout simple, mentionné au tout début de ce récit. "En ce temps-là (c'est à dire juste après que Joseph, le plus jeune frère de Juda, ait été vendu par ses propres frères à des marchands madianites) Juda s'éloigna de ses frères" (Genèse 38:1). Ces deux épisodes de la vie de Juda sont étroitement liés. Il s'était rendu complice de ce qui était arrivé à Joseph, son demi-frère (Genèse 37). Il peut parfois être facile de focaliser son attention sur "la faute" d'une personne, mais pour en comprendre le sens, il faut parfois en aller chercher bien plus loin la cause. 

Il est dit d'Onan qu'il ne voulait pas que que ses propres enfants portent le nom de son frère aîné qui, faut-il le rappeler, "était méchant". Le texte dit d'ailleurs qu'Onan considérait Tamar comme "la femme de son frère" et non comme son épouse. Dieu aurait-il pu faire mourir Onan seulement parce qu'il refusait à Tamar d'avoir des enfants ? L'expression "Le fit mourir" peut également signifier qu'Onan, par son attitude, déplut à l'Eternel qui n'exerça plus sur lui de protection particulière. La cause de sa mort est inconnue. Mais le fait de s'être désolidarisé de la Volonté divine l'aurait privé de la protection dont il était assuré jusque là. Il fut, en quelque sorte, livré à lui-même sans que Dieu n'intervienne plus en quoi que ce soit dans les circonstances de sa vie. Ayant opté pour la désobéissance, il se désolidarisait volontairement, faisant le choix de diriger sa vie comme il l'entendait. Une telle attitude lui fut finalement fatale. Bien plus tard, le prophète Samuel dira à Saül : "La désobéissance est aussi coupable que la divination, et la résistance ne l'est pas moins que l'idolâtrie… puisque tu as rejeté la Parole de l'Eternel, il te rejette aussi" (1 Samuel 15:23). Un même principe divin s'applique à des circonstances différentes mais pouvant présenter des similarités, comme "la résistance" et la "désobéissance". Il ne faut cependant pas voir, dans l'acte d'onanisme proprement dit, la raison d'une "mise à mort" voulue de Dieu. Les événements qui sont décrits dans ce passage découlent en réalité d'une décision de Juda, fils de Jacob, de "s'éloigner de ses frères" et ce, suite à ce qui s'était passé précédemment avec son frère Joseph dont il devait porté le poids du remords. D'un événement en a découlé un autre, et d'une circonstance sont venues des conséquences. Chaque action, quelle qu'elle soit, implique des répercussions plus ou moins importantes. Quant à Joseph, il refusa les avances de la femme de Potiphar, ce qui lui valut, au final, de se retrouver en prison, accusé injustement par la femme qui le convoitait (Genèse 39:10) 

Maladies vénériennes   

A diverses époques durant lesquelles la peste sévissait, les communautés juives furent accusées d'en être responsables, sous le prétexte fallacieux qu'il y avait nettement moins de victimes parmi elles que dans le reste de la population. Mais ce fait était dû à ce que les communautés juives continuaient à pratiquer les prescriptions lévitiques sur l'hygiène, alors qu'ailleurs, ses notions les plus élémentaires n'étaient pas respectées. Les Juifs furent, bien souvent, et sur de longues périodes, placés "hors du camp". Entassés dans des ghettos ou parqués dans des lieux à l'écart de la population "autochtone". Considérés comme des "pestiférés". Paradoxalement, la pratique des recommandations bibliques aurait pu prévenir la venue de ces fléaux comme la Peste. Ceux-ci touchèrent alors des populations entières et décimèrent des villes, les dépouillant de la grande majorité de leurs habitants. D'autres maladies, comme les maladies vénériennes, firent (et font encore) beaucoup de victimes. Une fois de plus, les recommandations bibliques permirent d'endiguer ces fléaux. 

Le texte du Lévitique fait mention de maladies vénériennes comme la "gonorrhée" (zowb - Lévitique 15:2). La gonorrhée, appelée également blennorragie, est une maladie vénérienne très répandue dans le Monde. Causée par une bactérie, elle peut toucher les hommes comme les femmes. Elle se transmet par relations sexuelles mais également de la mère à l'enfant, lors de l'accouchement. Les symptômes sont, entre autres, une urine fort colorée pouvant fortement tacher le linge. Une miction (l'action d'uriner) douloureuse chez l'homme et des saignements vaginaux chez la femme. Cela peut également produire des écoulements de pus par le rectum et des écoulement par les selles. Rien de très ragoûtant, je l'avoue. Mais il fallait bien mettre des mots sur ce nom "gonorrhée". Cela permet également de mieux comprendre toutes ces recommandations qui abondent dans le livre du Lévitique. Tout ce qui était en contact avec une personne atteinte de cette maladie était considéré comme "impur" (Lévitique 15:2 à 13). La loi mosaïque prévoyait un protocole pour les personnes qui en étaient guéries (Lévitique 15:13 à 15), mais cette maladie était généralement incurable et sa finalité pouvait être mortelle, à court ou à long terme. 

Derrière les mots "pureté et impureté", on retrouve des notions qui n'ont été véritablement développées, en Europe, qu'au dix-neuvième Siècle. Des notions comme la propreté, l'hygiène, la salubrité, la prophylaxie, l'asepsie, l'assainissement, l'antisepsie, la prévention. Mais comme la lecture de la Bible était, jusqu'alors, interdite… J'en reviens ici au texte de la Genèse (Genèse 34) dont j'ai parlé plus haut, et qui relate le viol de Dina, fille de Jacob, par Sichem. Le texte ne le dit pas explicitement, mais l'usage du vocable "tame" pourrait laisser supposer que celle-ci aurait contracté une maladie vénérienne par ce viol (Lévitique 15:2/22:4) Dans ce cas, le mot "déshonorée", utilisé par Segond dans sa traduction, prendrait un sens plus complet encore. 

Mais, comme je l'ai dit plus haut, le texte biblique ne cesse de surprendre, et même, en certains cas, de nous déstabiliser (le mot "zuwb" est également utilisé pour désigner les menstruations - Genèse 31:35). L'usage d'un même vocable s'inscrit parfois dans des contextes tellement opposés qu'il est difficile d'imaginer le lien qui puisse exister entre ces différents textes. Et pourtant, il y en a un. Ainsi, sur les quarante-et-une mentions (occurrences) du mot "zuwb", vingt utilisent l'expression bien connue "le pays ou coulent (zuwb) le lait et le miel". Pays qui est pourtant appelé "le plus beau des pays" (Ézéchiel 20:15). Mais celui-ci était auparavant celui des "Cananéens", dans lequel l'Eternel a fait entrer les Hébreux (Exode 13:5). L'Eternel les mit en garde de ne pas imiter les nations alentour. Ce qu'ils firent cependant. Les éclaireurs hébreux, lorsqu'ils rendirent leur rapport au peuple, dirent : "Le pays que nous avons parcouru, pour l'explorer, est un pays très bon, excellent" (Nombres 13:27 / 14:7, 8). Il était cependant occupé par des nations païennes aux mœurs dissolues. D'où, probablement, la prolifération de maladies vénériennes. A tel point que même un sacrificateur pouvait la contracter. Mais afin de ne pas entacher la fonction en l'associant à ce que l'on appelait autrefois "une maladie honteuse", cet homme sera désigné comme étant de "la race d'Aaron" (Lévitique 22:4). Il devra se placer "hors du camp" (Nombres 5:2 à 4). Ce qui démontre que la notion de "mise en quarantaine" était déjà connue et pratiquée. Les Hébreux ayant parfois adopté les modes de vie des nations alentours, et se mêlant à leurs populations, s'en trouvèrent également contaminés. Sichem, après avoir violé Dina, voulut l'épouser, et proposa de mêler les filles et les fils de Sichem avec ceux des Hébreux. Les frères de Dina, désireux de venger leur sœur, utilisèrent un subterfuge. Ils simulèrent leur accord mais exigèrent que tous les hommes de la ville soient préalablement circoncis. La circoncision, outre le fait qu'elle soit le symbole d'une alliance, a également des effets de prévention de dépôts bactériens. La demande des frères semblait vouloir dire : "D'accord, mais on ne veut pas que ce qui est arrivé à Dina se reproduise. On ne tient pas à ce que nos autres filles contractent la même maladie". L'argument était convainquant. Alors que tous les mâles de Sichem étaient en convalescence, les Hébreux les passèrent par le fil de l'épée.   

Après que Joab eut assassiné Abner, David le maudit en lui souhaitant de souffrir d'une maladie vénérienne (ou de la peste) qui soit attachée à sa descendance (2 Samuel 3:29). "Qu'il soit atteint d'un flux (zuwb)...". Ce genre de maladie pouvant avoir, comme symptôme, des pertes de sang (anales ou par miction), cela serait  ici directement lié au fait que le sang d'Abner a été versé de façon inique. On touche ici à ce que l'on pourrait appeler une "malédiction générationnelle" due à un meurtre commis. Une maladie incurable se transmettant ainsi de génération en génération. La malédiction se manifestant par des faits similaires à la cause initiale. Mais le mot "zuwb" peut avoir un tout autre sens. Ainsi, les textes nous disent que les Hébreux, lorsqu'ils entrèrent en Canaan, oublièrent vite le Dieu qui avait fait "couler" (zuwb) de l'eau du rocher, lorsqu'ils étaient dans le désert. Ils adoptèrent rapidement les pratiques cananéennes "impures" issues, comme beaucoup de choses, de Babylone. Et lorsque Dieu ordonna à son peuple de sortir de celle-ci, Il promit, tout à nouveau, de faire "couler" (zuwb) pour eux, l'eau du rocher (Esaïe 48:21). La pureté de cette eau contrastant avec les "flux" (zuwb) causés par les maladies vénériennes, contractées au contact de ces populations.   
 


J'avais également évoqué plus haut le fait qu'une épouse fidèle pouvait être contaminée, à son insu, par son mari. Un examen médical de routine lors d'une grossesse pouvant soudain révéler la présence d'une maladie vénérienne. L'enfant se retrouvant ainsi contaminé à la naissance par le contact avec le sang de sa mère. La contamination pouvant également se faire dans l'autre sens. Le mari pouvant être contaminé par une épouse infidèle. J'ai mentionné plus haut quelques symptômes de cette maladie. La perte de flux, de sang, de sécrétion vaginale, de sperme. Sans compter les plaies apparaissant sur le corps. On peut mieux comprendre ce que la notion d'impureté du lit conjugal pouvait signifier. Les règles sanitaires prophylactiques de rigueur que nous connaissons aujourd'hui n'avaient pas toujours court alors. Literies et vêtements étaient lavés à la rivière au vu et au su des autres lavandières. Au mieux, l'usage de bassines pouvaient-elles procurer un semblant de discrétion. Néanmoins, le fait d'être porteur de telles maladies modifiait considérablement la vie sociale de celui qui en était atteint. L'évocation par analogie avec la pestilence n'est pas exagérée. Pour la personne malade, la désocialisation était souvent la conséquence immédiate.  

Le survol de ce sujet permet de voir que "l'impureté" (tame) peut avoir des incidences au niveau personnel comme au niveau national. Même si la bénédiction de Dieu "coule" (zuwb) sur le pays, l'iniquité n'en est pas moins active, et ses conséquences s'inscrivent dans la durée sur un plus ou moins long terme. Les lois qui étaient censées régir la vie quotidienne du peuple hébreu dans ce pays-là avaient pourtant été, préalablement, gravées dans la pierre afin qu'on les observe (Deutéronome 27:3). Le pays fut alors souillé par ses habitants (Lévitique 18:25) malgré les recommandations de Dieu (Lévitique 18:26, 27). La menace de l'Exil commençait alors à peser sur le peuple de ce pays où "coulait le lait et le miel" (verset 28). Mais quelles sont ces choses abominables auxquelles s'étaient livrés les Hébreux ? Des choses comme par exemple "avoir commerce avec la femme de son prochain". Cette expression pudique édulcore un peu, me semble-t-il, les mots utilisés par l'auteur biblique. "Shekabeteka lezara" a un sens plus prononcé. Strong traduit le mot "Shekobeth" par "copulation". Il désigne également l'adultère (Nombres 5:20) ou encore le fait d'avoir des relations sexuelles avec un animal (Lévitique 18:23 - 20:15)"Zera" (Lezara) signifie, quant à lui, "semence, sperme, descendant". Il peut également désigner une "famille" ou encore une "pollution"L'association de ces deux mots ne désigne pas seulement l'adultère proprement dit. Il désigne le fait d'entretenir une relation conjugale à long terme, au point d'avoir une double vie et des enfants dans chaque ménage. L'expression "avoir commerce avec la femme de son prochain" peut laisser même supposer qu'un homme avait eu des enfants avec une femme mariée, et que ces enfants grandissait dans la maison du mari de celle-ci. L'existence du véritable géniteur étant bien évidemment inconnue du mari trompé. 

Pire encore, le fait d'avoir des relations avec un animal (behemah)"Tu ne coucheras pas avec une bête pour te souiller avec elle. La femme ne s'approchera pas d'une bête pour se prostituer avec elle. C'est une confusion (tebel)" (Lévitique 18:23 / 20:15, 16). Cette "confusion" est appelée aujourd'hui zoophilie. "Tebel" désigne une perversion sexuelle, une violation des lois de la nature ou d'un ordre divin. Ce mot désigne également les relations intimes entre un homme et sa belle-fille (Lévitique 20:12). L'apôtre Paul écrira : "Dieu les a livrés à l'impureté selon les convoitises de leurs cœurs, en sorte qu'ils déshonorent eux-mêmes leurs propres corps" (Romains 1:24). La mythologie relate l'enlèvement de la jeune fille Europe par le dieu Zeus qui, pour s'approcher d'elle et la séduire, se métamorphosa en taureau blanc. Le jeune femme monta sur son dos. Le taureau fonça alors vers la mer et l'emmena sur une île de la mer Égée. De leur union, naquit le minotaure, un homme avec une tête de taureau. Une statue d'Europe et du taureau Zeus trône devant le Parlement Européen, à Bruxelles. Lorsque l'on regarde cette sculpture, on ne peut s'empêcher de penser à ce passage de l'Apocalypse : "Je vis une femme assise sur une bête écarlate (red bull)… et l'ange lui dit : Je te dirai le mystère de la femme et de la bête qui la porte" (Apocalypse 17:3, 7). Le texte de Jean nous dit : "La femme que tu as vue, c'est la grande ville qui a la royauté sur les rois de la terre" (Apocalypse 17:18). C'est effectivement au cœur de la capitale belge que se trouve le pouvoir décisionnaire en Europe. "La Bête" dont nous parle les Ecritures aura-t-elle une quelconque ressemblance avec ce qu'engendra ce couple mythologique ? Un homme à tête de taureau ? Lorsque Sédécias monta sur le trône, à Jérusalem, il "raidit son cou et endurcit son cœur, au point de ne pas retourner à l'Eternel, le Dieu d'Israël. Tous les chefs religieux et le peuple multiplièrent (ma'al) aussi les transgressions selon toutes les abominations des nations" (2 Chroniques 36:11 à 14). "Ma'al", c'est "une action infidèle ou traîtresse, une transgression contre l'homme et contre Dieu". N'est-ce pas de cette façon que Zeus a agi pour kidnapper la jeune fille Europe ? Quant au mot "abomination" (tow'ebah), il désigne une "chose dégoûtante, abominable, dans le sens rituel ou moral". 

Le prophète Michée écrit que, "à cause de la souillure", toutes ces transgressions seront la raison de "grandes douleurs, de douleurs violentes" (Michée 2:10). Des maladies vénériennes, comme la syphilis, pouvaient se manifester, entre autres, par des douleurs mais également par des troubles mentaux. Les manifestations sur le corps pouvaient faire penser à une forme de lèpre. Le Psalmiste se lamente en disant que "les nations ont profané (tame) ton Saint Temple, elles ont fait de Jérusalem un monceau de ruines" (Psaume 79:1). "Tame" peut désigner à la fois la profanation d'un édifice, d'un lieu, d'un objet ou d'une personne. Lorsque Esdras revint d'exil à Jérusalem, il apprit, de la bouche des chefs du peuple, que le "peuple d'Israël, les sacrificateurs et les lévites ne se sont pas séparés des peuples de ce pays et ils imitent leurs abominations, celles des Cananéens" (Esdras 9:1). "Car ils ont pris de leurs filles pour eux et pour leurs fils et ont mêlé la race sainte avec les peuples de ces pays, et les chefs et les magistrats ont été les premiers à commettre ce péché" (Esdras 9:2). On retrouve un peu ici l'histoire de Juda et de Tamar dont il était question plus haut (Genèse 38). Esdras reconnaît, avec les Prophètes, que "le pays est souillé (niddah) par les impuretés (niddah) des peuples de ces contrées, par les abominations (towebah) dont ils l'ont rempli d'un bout à l'autre avec leurs impuretés (tumah) (Esdras 9:11). Les nations ne tenant nullement compte des règles de vie recommandées par la Thora divine, hommes et femmes avaient des relations intimes pendant les périodes de menstruations. Les filles des Hébreux épousaient des Cananéens et n'étaient plus tenues d'observer ces périodes d'abstinence. Il se peut d'ailleurs que leurs maris ne leur en laissaient pas le choix (Ézéchiel 18:6 / 22:10). Elles demeuraient donc "impures" selon un point de vue thoraïque et n'avaient aucune possibilité de se "purifier". Dieu dira, toujours par la bouche d'Ézéchiel, que les habitants ont souillé le pays par leur inconduite et celle-ci a été devant lui comme "la souillure d'une femme pendant son impureté" (Ézéchiel 36:17). Le prophète fait peut-être ici justement allusion à cette pratique. 

D'hier à aujourd'hui  

Alors que je parcourais ces textes avec la plus grande attention, l'un d'eux m'évoqua soudain des événements de sinistre mémoire. "Tout objet sur lequel tombera quelque chose de leurs corps morts sera souillé. Le four et le foyer seront détruits. Ils seront souillés et vous les regarderez comme souillés (Lévitique 11:35). L'association des mots "corps morts" et "four"... Je me remémorai alors les paroles du prophète Jérémie : "On entend des cris à Rama, des lamentations, des larmes amères, Rachel pleure ses enfants, elle refuse d'être consolée sur ses enfants car ils ne sont plus" (Jérémie 31:15). Matthieu fait allusion à ce texte pour parler d'un monstrueux infanticide ordonné par Hérode (Matthieu 2:18). Les "corps morts" de ces enfants furent, préalablement, arrachés aux bras de leurs mères qui hurlaient. Parmi ces femmes, ce n'étaient que "lamentations, cris et larmes amères". Elles "refusaient d'être consolées". Une même horreur eut lieu, deux mille ans plus tard. Ils parlaient une autre langue. Les uniformes étaient différents, mais ces tortionnaires arboraient, eux aussi, comme emblème l'aigle aux ailes déployées. L'insigne d'un peuple qui se prétendait de "race pure" (Proverbes 30:12). En regard de ces événements du Passé, ces mots du livre des Proverbes prennent un sens nouveau. "Il est une race qui se croit pure et qui n'est pas lavée de sa souillure, dont les yeux sont hautains, dont les dents sont des glaives et les mâchoires des couteaux, pour dévorer le malheureux sur la terre, et les indigents parmi les hommes" (Proverbes 30:12 à 14). Rachel pleura, à nouveau, ces enfants que l'on arrachait, une fois de plus, aux bras de leurs mères, et leurs corps morts étaient mis dans des fours. Il leur était nié le droit d'exister. Et pour tous ceux qui furent jetés nus dans des fosses communes, il leur était également refusé le droit de disposer d'une inhumation digne de ce nom. Ils furent humiliés, violentés, spoliés de leurs biens, séparés de leurs familles, maltraités, affamés, incarcérés, puis incinérés. Elles furent plus de cent mille femmes, rien que pour le camp de Ravensbrück. Dans quelles conditions ces femmes ont-elles vécu leurs périodes menstruelles ? Combien de femmes, toutes confessions religieuses confondues, sont-elles obligées, aujourd'hui encore, de se soumettre au diktat d'hommes qui leur imposent ce que leur conscience et leurs convictions leur interdisent ? Combien de femmes ne bénéficient-elles pas, aujourd'hui, encore, du respect élémentaire de leur propre corps ? Combien de femmes sont-elles violentées par des hommes qui oublient que, eux aussi, eurent une mère. J'aimerais terminer en citant ce magnifique texte du livre des Proverbes. "Parole du roi Lémuel, sentences par lesquelles sa mère l'instruisit. Que te dirais-je mon fils, que te dirais-je, fils de mes entrailles, objet de mes vœux… (la femme) ceint de force ses reins" (Proverbes 31:1, 2, 17). 

Conclusion  

J'ai bien conscience que la longueur de cet article pouvait rebuter plus d'un lecteur potentiel. Je ne pouvais cependant pas me résigner à l'amputer d'une quelconque partie. À sa relecture, il me semble avoir passé sous silence tant de sujets, et d'autres n'ont été qu'à peine effleurés. Il me paraissait pourtant difficile d'être à la fois précis, succinct et complet. Pourtant, il m'a semblé que ce sujet ne pouvait être traité que dans sa globalité. Il me fallait l'aborder dans tous ses aspects, ou ne pas en parler du tout. J'ai donc tenté ici le difficile exercice de concilier l'exhaustivité avec les limites que m'imposait la taille raisonnable d'un article, fut-il en deux parties. Peut-être me faut-il envisager de creuser plus encore le sujet dans des articles ultérieurs ? Les thèmes abordés ici semblent le réclamer.   

J'avais également conscience que certains sujets "sensibles" pouvaient être susceptibles de choquer, d'offusquer. Mais là aussi, il me fallait faire preuve de la plus grande objectivité possible, en laissant la parole aux textes. Durant la rédaction de cet article, j'ai gardé à l'esprit la ligne directrice que je m'étais imposée dès le début de sa rédaction. Premièrement, me poser la question : "Que dit le texte ? que dit-il vraiment ?". Ensuite, chercher à comprendre ce que les apôtres de Christ, ses disciples et leurs contemporains pouvaient comprendre de ces textes qu'ils connaissaient bien et qui conditionnaient leur quotidien. Le but étant d'apprendre à mieux comprendre ce récit biblique de l'Evangile, que nous nous targuons de si bien connaître, et le contexte dans lequel il est né. Je n'ai bien évidemment fait que survoler le sujet. Mais ce survol suffit à faire ce constat. Notre conception diffère, et de loin, de celle des personnages mentionnés dans ces récits. Par certains aspects, un ravin nous en sépare. Alors, quelle attitude adopter face à cette constatation ? Peut-être que la première démarche serait de reconnaître, avec humilité, que nous connaissons bien mal ces Ecritures dont nous nous revendiquons. Jésus a dit : "Ne pensez pas que moi je vous accuserai devant mon Père. Celui qui vous accuse, c'est Moïse en qui vous avez mis votre espérance, car si vous croyiez Moïse, vous me croiriez aussi parce qu'il a écrit de moi. Mais si vous ne croyez pas à ses écrits, comment croirez-vous à mes paroles ?" (Évangile de Jean chapitre 5, versets 39, 45 à 47). Ces mots ne proviennent pas de la bouche d'un "judaïsant" mais de celle de notre Seigneur, et elles ont été reproduites par l'un de ses plus fidèles disciples. 

Bien évidemment, il est facile de faire le reproche à ces Juifs de ne pas avoir reconnu, en Jésus, le Massiah. Car c'est à eux, premièrement, que Jésus s'adresse. Mais ces paroles de Jésus ne pourraient-elles pas s'adresser également à ceux qui, tout en se revendiquant "de la Bible", délaissent, ignorent, voire dénigrent ce qu'ils appellent, avec un brin de condescendance, "l'Ancien Testament". Admettons un instant, juste un instant, que Jésus puisse s'adresser aux membres d'une assemblée chrétienne. Du haut de la chaire (pour peu qu'on l'autorise à prendre la parole), il redirait ces mêmes paroles : "Car si vous croyiez Moïse, vous me croiriez aussi parce qu'il a écrit de moi. Mais si vous ne croyez pas à ses Écrits, comment croirez-vous à mes paroles ?".

Hommage

J'aimerais, pour terminer, rendre ici un hommage à mon épouse qui relit et corrige patiemment chacun des articles de ce blog avant sa parution. Sans elle, ce blog ne serait pas. Sans elle, les articles publiés n'auraient pas une telle qualité de présentation. Épouse aimante, discrète, elle est aussi ma première lectrice. Elle sait qu'elle a la liberté de me reprendre ou de me corriger lorsque j'ai commis une erreur, que se soit de syntaxe ou de vocabulaire. Son regard de femme m'a été infiniment précieux pour finaliser cet article. Son avis est toujours pertinent. Ses conseils toujours judicieux. Je l'écoute et j'en tiens compte. Elle m'est une précieuse collaboratrice dans la rédaction des articles de ce blog. Cet article, peut-être plus que tout autre, avait besoin de son regard. 

JiDé

Pur et Impur (deuxième partie)
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